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Les Trinquand et la Ferme de la Cave

Focus #17 : La bourse dite "courtoise"

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La bourse, ou aumônière, ancêtre du porte-monnaie, mesure 10 cm sur 13 cm. Elle est faite d’un tissu de lin recouvert d’un taffetas de soie rouge. Son décor est brodé en fils de soie. La poche est munie de deux passants destinés à la fermer, et d’un lien pour l’accrocher à la ceinture. Le style du décor et son sujet permet de la dater de la seconde moitié du 12siècle.

La face principale (1) représente une femme qui tient un chien en laisse en conversation avec un homme tenant un rapace sur sa main droite. Sur la face opposée (2), un cheval sellé est attaché à un arbre sur lequel sont posés des oiseaux.

On peut y reconnaitre un chevalier faisant la cour à une noble dame : le chevalier ne porte pas d’épée (inconvenant dans ce type de relation) mais est identifiable par la présence de son cheval et d’un faucon apprivoisé pour la chasse, privilège de la noblesse. La noblesse de la dame est suggérée par son style vestimentaire et la possession d’un animal de compagnie.

Cette bourse illustre un genre littéraire en vogue au Moyen-âge : l’amour courtois ou fin'amor (« amour parfait »). Celui-ci place l'amour au sommet de toutes les lois, ce qui est contraire aux enseignements de l'Église et des usages de l'époque Le chevalier se soumet entièrement à la femme qu'il aime, généralement mariée et d'un rang social supérieur au sien. Il doit suivre un parcours semé d'épreuves qu’elle lui impose contre diverses récompenses jusqu’à ce qu’elle lui accorde ses faveurs, l’amour courtois n’étant pas un amour platonique. L’exemple le plus connu est celui de Lancelot, amant de la reine Guenièvre qui est la femme de son suzerain le roi Arthur.

Cet objet, a servi à envelopper plusieurs reliques du haut Moyen-âge. Jean-Pierre Laporte, qui a étudié les reliquaires conservés dans l’église Saint-André d’où il provient, émet l’hypothèse que cette aumônière au décor profane, très éloigné des valeurs promus par l’Eglise, a été donnée par une dame de la noblesse afin de protéger une ou plusieurs reliques lors d’une reconnaissance (ou inventaire). Celle-ci aurait été réalisée vers 1185 comme le suggère la date d’un parchemin retrouvé à l’intérieur ainsi que le style des costumes représentés.

Pour aller plus loin...

Estelle Doudet, L'Amour courtois et la chevalerie (Des troubadours à Chrétien de Troyes) Librio, 2004.

Jean-Pierre Laporte « Le trésor des saints de Chelles », Bulletin de la Société Archéologique et Historique de Chelles, nouvelle série n°8-9, Chelles 1988.